Alain Damasio - mercredi 14 octobre 9h15-10h15

L'homme qui prenait sa femme pour un clavier ou l'anthropotechnique à l'épreuve de la pire des sciences-fiction : celle qui s'interroge

Alain Damasio
Ecrivain de science-fiction
Grand Prix de l’Imaginaire 2006, la plus haute distinction française en science-fiction Prix du roman européen de Science-Fiction Utopiales 2007
Nouvelliste et scénariste (jeu-vidéo, télévision, BD)
Co-fondateur du studio de développememt de jeu vidéo Dontnod Entertainment

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Résumé

Ce qui me fascine avant tout, en tant qu’écrivain de science-fiction, c’est la façon dont l’homme réinvente par la machine son triple rapport à l’autre, à lui-même et au monde. L’interaction homme-machine, à ce titre, est un nœud passionnant où se joue bien plus que l’ergonomie ou les usages : une refonte récurrente, souvent inaperçue, de la façon dont l’humain redéfinit ce qu’il est par la technique — appelons ça l’anthropotechnique, à savoir une façon de devenir homme hautement, en s’ouvrant le monde ou tout au contraire en s’en fermant progressivement l’accès sous prétexte de réguler nos vies en outillant nos paresses.

Pour prendre quelques exemples : interfacer la technologie chaque fois que possible entre nous et le monde, multiplier du même mouvement les dispositifs de distanciation et la connectivité, éteindre le corporel au profit d’une fluidité immatérielle sécurisante, etc. Qu’est-ce que ça implique psychologiquement (dans la modification de notre rapport à soi) ? Qu’est-ce ça apporte et détruit socialement (dans notre façon de nous lier aux autres et d’échanger avec eux) ? Qu’est-ce que ça libère politiquement ? Il me semble que la science-fiction, dans son identité la plus forte, doit être la mise en scène et en perspective, en affects et en récits, de ces enjeux : les annoncer, jouer avec, anticiper, ouvrir des pistes et forger les armes, déjà, quand on sent la guerre qui gronde…

Mon intuition est que l’avenir se dessine comme le règne doux des citoyens-bulles, lovés dans une série d’enveloppes technologiques qui filtre, protège, gère et digère, et même interprète pour nous le monde extérieur. L’humain 2.0, qui arrive en pantoufles, se lira par sa typologie d’écorce et d’écrans, par sa façon d’aménager ce technococon qui apprivoise désormais notre rapport aux autres, au travail comme aux loisirs, à la nature comme à la ville. La monade pour monde. Avec feedbacks incessants. Une véritable échologie.

Cette conférence sera une brocante aux idées neuves et très anciennes, un bric-à-brac de sciences molles et d’anticipation hard, d’anecdotes vécues et d’extrapolations bigger than life ; une sorte de manifeste erroriste destiné à bugger les cortex où l’on parlera du téléphone portable, du macintosh et des claviers, de Gilles Deleuze et de Peter Sloterdijk, de réalité appauvrie et du posthumain prépubère. Ce sera drôle, qui sait, et parfois même instructif. Merveilleux, non ? 


Biographie

Alain Damasio, 40 ans, est un écrivain français de science-fiction. La Zone du Dehors, son premier roman, est une anticipation politique radicale sur nos sociétés de contrôle. Il met en scène le combat viscéral d’un mouvement révolutionnaire, la Volte, contre les dispositifs de dévitalisation qui traversent nos démocraties. Il a été récompensé par le Prix du roman européen de SF Utopiales 2007. Le second, La Horde du Contrevent, a été un succès aussi bien critique que public, salué en 2006 par le Grand Prix de l’Imaginaire, la plus haute distinction française dans le domaine. Publié en 2004, ce roman est déjà un classique des littératures de l’imaginaire. Il raconte l’épopée physique et mentale d’une Horde de vingt-trois personnages à la recherche de l’origine du vent. Alain Damasio est également nouvelliste et scénariste (jeu vidéo, télévision, BD). En 2008, il a cofondé un studio de développement de jeu vidéo, Dontnod Entertainment dont il assure la direction narrative (univers, scénario, personnages) pour un jeu d’action-aventure cyberpunk qui interroge nos rapports aux technologies intrusives, notamment mémorielles. Homme engagé, chef d’entreprise, longtemps président d’une compagnie théâtrale, ce lecteur avisé de Nietzsche, Foucault et Deleuze, puise son inspiration dans l’anticipation sociale et politique, la recherche du vivant, le mouvement et le lien. Les œuvres d'Alain Damasio. Les sites Alain Damasio : La zone du dehors, La horde du contrevent, la Volte.


Sommet de page

Joseph Sifakis - jeudi 15 octobre 8h30-9h30

Les systèmes embarqués - Nouveaux défis scientifiques pour l'Informatique.

Joseph Sifakis
Prix Turing 2007, médaille d'argent CNRS 2001
Directeur de recherche au CNRS
Chaire industrielle Schneider-INRIA
Fondateur du Laboratoire VERIMAG, Grenoble
Directeur de l’Institut Carnot Logiciels et Systèmes Intelligents , Grenoble

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Résumé

Les systèmes embarqués sont des composants qui intègrent du logiciel et du matériel et assurent des fonctionnalités critiques. Ils se caractérisent par une interaction continue avec leur environnement physique. Ils trouvent leur application dans de nombreux domaines comme les transports, les télécommunications, la distribution d’énergie ainsi que les produits électriques et électroniques.
Les systèmes embarqués doivent satisfaire non seulement des exigences fonctionnelles concernant la correction du calcul mais également des exigences extra-fonctionnelles. Ces dernières portent sur l’utilisation optimale des ressources (temps de calcul, mémoire, énergie) ainsi que sur l’autonomie, la réactivité et la robustesse du système. Actuellement, nous ne disposons pas d’un cadre théorique permettant la prise en compte conjointe des exigences fonctionnelles et extra-fonctionnelles lors de la conception des systèmes embarqués. Pour comprendre et analyser le comportement de ces systèmes, il faut pouvoir combiner des méthodes d’ingénierie fondées sur la Physique et des méthodes de l’Informatique. En effet, l’Informatique s’appuie sur des modèles de calcul discrets qui ignorent le temps et les ressources physiques. Étendre l’Informatique en y incorporant des paradigmes de disciplines fondées sur la Physique classique constitue aujourd’hui un défi majeur pour l’Informatique.
Quatre aspects de ce défi sont présentés:
- unifier modèles analytiques et modèles de calcul discrets ;
- construire des systèmes par composition de composants ;
- garantir les propriétés des systèmes par construction afin de vaincre la complexité et les limitations actuelles de la vérification a posteriori;
- assurer la prédictibilité du comportement afin de maîtriser l’incertitude inhérente au comportement dynamique des systèmes interactifs.
En conclusion, quelques différences fondamentales entre les deux disciplines et leurs conséquences sont discutées.

Référence : T.A. Henzinger and J. Sifakis. The Discipline of Embedded Systems Design Computer, October 2007, pp. 32-40

Biographie

Joseph Sifakis est Directeur de Recherche au CNRS et le fondateur du laboratoire Verimag à Grenoble. Il est titulaire de la chaire industrielle Schneider-INRIA depuis le 1er septembre 2008. Il est ingénieur électricien de l'Ecole Polytechnique d'Athènes, et docteur en informatique de l'Université de Grenoble. Le laboratoire Verimag est un des premiers laboratoires de recherche dans le domaine des systèmes embarqués critiques. Il est à l’origine des fondements théoriques et technologiques ayant donné l’outil SCADE, utilisé par Airbus pour la conception et la validation des systèmes critiques temps-réels. Cet outil est devenu depuis une référence dans l’aéronautique. Joseph Sifakis est reconnu pour ses travaux innovants, sur les aspects théoriques et pratiques en spécification des modèles concurrentiels et leur vérification. Il a contribué à l'emergence du Model-Checking, qui est devenu par la suite la méthode de vérification la plus utilisée actuellement pour la vérification des applications industrielles. Ses activités de recherche actuelles portent sur la conception à base de composants, la modélisation, et l'analyse des systèmes temps-réel avec un accent sur les techniques correctes-par-construction. Joseph Sifakis est également le coordinateur scientifique du Réseau Européen d’Excellence sur les systèmes embarqués ARTIST2 . Pour en savoir plus ...


Sommet de page

Mary Beth Rosson - vendredi 16 octobre 11h15-12h15

The Enf of Users? Supporting nonprogrammers who build software for their own purpose.

Mary Beth Rosson
Professor of Information Sciences and Technology
College of Information Sciences and Technology
Pennsylvania State University
Etats-Unis

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Abstract

For more than 25 years, user interface designers and usability engineers have studied and refined human-computer interaction techniques with the goal of improving people’s productivity and experience. But the target of these efforts, “the end-user,” is fast becoming a thing of the past. Many people now construct software on their own, building artifacts that range from email filters to spreadsheet simulations to interactive web applications. These individuals are end-user programmers: they build ad hoc solutions to everyday computing needs, and the amount and variety of information and computational tools available to them has been expanding at a rapid pace. The bright side of this phenomena is that users can obtain computational support for their tasks in a more timely fashion, and professional software developers can turn their attention to applications or repositories that are large, complex or or safety-critical. The dark side is that software created by nonprogrammers will almost certainly be less robust, less reusable, more difficult to maintain, and so on – all the characteristics that training in software development is intended to enhance. A less obvious dark side is that a new variation of digital divide may be emerging, if only some segments of the nonprogrammer population are able or willing to engage in end-user programming. In this talk I will survey recent initiatives in support for end-user programmers and discuss the implications and open research issues raised by the goal to promote programming by nonprogrammers.

Biography

Mary Beth Rosson is Professor of Information Sciences and Technology at The Pennsylvania State University. She received a PhD in experimental psychology in 1982 from the University of Texas. Prior to joining the College of Information Sciences and Technology at Penn State in 2003, she was professor of computer science at Virginia Tech for 10 years and research staff member at IBM T. J. Watson Research Center for 11 years. Rosson was a pioneer in the study of psychological issues in object-oriented design, and spent many years developing and evaluating object-oriented tools and training for professional programmers. An abiding interest has been the interplay between human-computer interaction and software engineering. Recently Rosson has been studying the tools and practices of end-user programmers. Rosson has a long history of professional service in ACM and IEEE, including general chair of OOPSLA 2000, CHI 2007, and VL/HCC 2010. She is an ACM Distingisheed Scientist and a member of the CHI Acadey. Rosson is author of Usability Engineering: Scenario-Based Development of Human-Computer Interaction (Morgan Kaufmann, 2002) as well as numerous articles, book chapters, and professional short courses. More details ...


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Trois conférenciers invités :


Alain Damasio

- L'homme qui prenait sa femme pour un clavier ou l’anthropotechnique à l'épreuve de la pire des science-fictions : celle qui s’interroge.
- Mercredi 14 octobre, 9h15-10h15

Joseph Sifakis

- Les systèmes embarqués - Nouveaux défis scientifiques pour l'Informatique.
- Jeudi 15 octobre, 8h30-9h30

Mary Beth Rosson

- The Enf of Users? Supporting nonprogrammers who build software for their own purpose.
- Vendredi 16 octobre, 11h15-12h15